le 12/10/2023
-Les donations et successions d’entreprise exerçant la location meublée à usage d’habitation peuvent désormais bénéficier du dispositif Dutreil. Celui-ci prévoit l’exonération de 75% des droits de mutation à titre gratuit, sous réserve de remplir de nombreuses conditions.
Alors que la fiscalité des loyers issus de la location meublée saisonnière fait débat, les propriétaires peuvent se réjouir d’une bonne nouvelle sur le terrain fiscal de leur activité. Celle-ci est désormais éligible au dispositif qui prévoit l’exonération de 75% des droits de donation ou succession en cas de transmission d’une entreprise exerçant une telle activité. Explications.
L’exonération de 75% des droits de donation ou de succession
Le dispositif Dutreil prévoit que les transmissions d’entreprises (donation ou successions) peuvent être exonérées à hauteur de 75% de leur valeur sous conditions. Ce dispositif est réservé aux entreprises – individuelles ou en société -, exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ou de holding animatrice. Parmi les autres conditions, les associés, doivent avoir pris des engagements de conserver les titres transmis avec d’autres associés. Après la transmission, les donataires ou héritiers doivent à leur tour prendre des engagements de conserver l’entreprise pendant un certain temps. Ces engagements (collectifs et individuels) ont donné son nom du dispositif : les pactes Dutreil, codifiés aux articles 787 B et 787 C du Code général des impôts (CGI).
La location meublée : une activité commerciale
Jusqu’à présent, l’administration fiscale refusait d’appliquer le bénéfice à certaines activités. Elle les avait même listées dans sa doctrine officielle. Elle avait ainsi écarté les activités de location de locaux meublés à usage d’habitation, les activités de location de locaux nus (quelle que soit l’affectation des locaux), les activités de loueurs d’établissements commerciaux ou industriels munis du mobilier ou du matériel nécessaire à leur exploitation, ou encore les activités de promotion en restauration de son patrimoine immobilier. Ces exclusions ont été contestées devant la justice. Des contribuables ont saisi le Conseil d’État, lui demandant d’annuler purement et simplement le passage litigieux de la doctrine administrative.
C’est chose faite. Dans un arrêt du 29 septembre, le Conseil d’État a annulé le paragraphe prévoyant l’exclusion des activités de location de locaux meublés à usage d’habitation. Pour lui, « le fait de donner habituellement en location des locaux d’habitation garnis de meubles ne saurait être systématiquement regardé, pour l’application de la loi fiscale, comme une activité civile dépourvue de caractère commercial ». Le juge ajoute que si la location de son propre patrimoine immobilier n’est pas considéré comme une activité commerciale au regard de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), « aucune disposition de portée similaire ne permet, en revanche, de dénier de manière générale à la location de locaux meublés à usage d’habitation le caractère d’activité commerciale au sens des articles 787 B et 787 C du CGI » (Conseil d’État, 29 sept. 2023, n° 473972).
Prudence
Cet arrêt a chassé les derniers doutes sur l’éligibilité au dispositif Dutreil de l’activité de location de locaux meublés à usage d’habitation. Toutefois, il ne faut pas oublier de respecter les autres conditions requises par la loi, et notamment celle qui impose que l’activité éligible soit exercée tout au long de la durée des engagements de conservation. Enfin, n’oublions pas que la saison des lois de finances et des réformes fiscales qui l’accompagnent est ouverte, et ce jusqu’au 31 décembre. L’occasion pour Bercy de faire passer ses conditions dans la loi : exclusion légale, limitation, ou tout autre mesure qui viendrait limiter, voire annuler la portée de la décision de justice récente, au moins pour l’avenir.